Dans la ville de Yaoundé, les déchets organiques, électroménagers et électroniques, souvent considérés comme inutiles, trouvent une seconde vie esthétique grâce aux opérations de recyclage. Des artisans locaux créent des sacs, des sandales, des bijoux à partir de ces déchets, retrouvés dans les casses et les poubelles. Cette pratique transforme peu à peu la cité capitale en une étoffe de mode durable.
Quand la mode se recycle, Yaoundé tisse l’avenir en fil vert. Les designers locaux sont les principaux acteurs de cette scène. Sous leurs doigts, le rebut devient ravissement, le déchet se fait désirable.
Au quartier Mimboman, Eliane, designer, fait du plastique son précieux allié. Au quotidien, elle arpente les poubelles, en quête de cette matière devenue source d’inspiration.
« On met l’environnement au propre. C’est gagnant-gagnant : la nature est propre et nous, on a notre petit gain. » Affirme t-elle le sourire aux lèvres. Une fois collecté, ce plastique métamorphosé par son talent se mue en trésors prisés par une clientèle sélecte, d’ici et d’ailleurs.
Chapeaux, chaussures, vêtements et autres accessoires sortent de son moule. Ces créations s’arrachent comme des petits pains et leur prix oscille entre 1 000 FCFA et 50 000 FCFA.

Des Designers plus créatifs que jamais !
Le plastique n’est qu’une muse parmi tant d’autres pour ces stylistes. Dans l’intimité de son atelier logé au Centre international de l’artisanat de Yaoundé, Ousmane Ali propose une nouvelle tendance de bijoux à impact environnemental minime.
« Je fais des accessoires de mode, des bijoux en cuir, ou avec des morceaux de bois abandonnés, de nickel, des vieilles pièces d’ordinateur. Je récupère ces objets dans les casses et les poubelles. » Explique-t-il.
Son rêve est de vulgariser sa passion et de montrer aux yeux du monde que les déchets, qu’ils soient organiques ou électroniques, peuvent constituer une base solide pour des créations innovantes.

L’enjeu environnemental
Le Cameroun, confronté à plus de 2 millions de tonnes de déchets annuels et un taux de recyclage qui plafonne à 15%, se trouve à la croisée des chemins. Malgré qu’ils soient de plus en plus nombreux à développer de telles initiatives, il y a lieu de se demander si elles pourraient impacter positivement l’environnement ? Si oui, quel pourcentage de réduction de l’empreinte carbone pourrait-on attribuer à leurs efforts ?
Selon Steve Djeutchou, environnementaliste et expert en énergie renouvelable, le recyclage des déchets plastiques, pour en faire d’autres objets empêche les fabricants de ces plastiques de polluer l’atmosphère en les refabriquant à partir d’un modèle déjà transformé. Ce qui signifie que les designers et créateurs qui ont pour muse les objets issus des déchets réduisent considérablement l’empreinte carbone.
D’après Greenpeace, 100 millions d’articles éco-responsables sont vendus dans le monde par an, ce qui témoigne malgré tout d’un engouement croissant pour une mode consciente.
Les pratiques de ces designers ne sont pas seulement synonymes de mode durable. Elles incarnent une renaissance culturelle. Les anthropologues y voient la perpétuation d’un savoir-faire ancestral.